Septembre 2022

Une rencontre inattendue :

 

Voilà que suite aux articles récents dans les journaux sur notre petite entreprise, je reçois un message sur mon téléphone d’une gentille dame qui me dit avoir reconnu « sa cave » sur la photo !

Pendant 38 ans cette dame a vécu à cette adresse et la cave que nous utilisons maintenant pour l’affinage de nos fromages, servait à stocker des bières et du vin pour leur commerce.

Un peu de recherche et « hop » en route vers la maison de retraite de Steenvoorde pour rendre une petite visite surprise à Mme Jeanine. Ce qui suit est un très agréable moment avec plein d’histoires sur Eecke et alentours. Il s’avère qu’elle est une très bonne raconteuse qui a elle-même déjà écrit dans le journal !

Nous amenons avec nous un bon souvenir et une belle photo de cette rencontre.

Bien sûr elle pourra maintenant aussi goûter au fromage d’Eecke. :-)

JUIN 2022

 

Hello à tous !

 

Une petite mésaventure qui a fini aux Urgences m’a poussé à mettre sur papier ce qui m’est arrivé.

Si vous avez deux minutes, attendez jusqu’à ce que vous ayez 5 minutes.

Bonne lecture, vous m’envoyez un sourire à la fin ?

 

Frank

Piqué tu seras !

 

( le récit de 5h aux Urgences pour 3 points dont un mal fait)

 

Godvermiljaadenondevlammesteschiéfkiekekot !!! 5 fois j’avais dit à Sarah, ma collaboratrice, d’être prudente avec le couteau de fromage, fraîchement aiguisé par notre boucher du village.  5 fois ! Et maintenant c’est moi qui me coupe dans deux doigts !  J’étais en train de servir mon dernier client du soir.  Pendant qu’on se racontait notre vie et que je le servais, j’étais aussi en train de couper des cubes pour la Mairie pour une réception demain.  Et là je me suis loupé.  Deux fois en deux secondes.  La première fois j’avais encore évité contact avec le couteau mais la deuxième fois (comment puis-je être si …) je me suis bien coupé. 

 

« Que faire ? » demande le gentil client. 

 

« Va sonner chez la voisine en bas de la rue.  Elle vient d’acheter du fromage et sa copine qui est infirmière était avec elle pour prendre l’apéro ce soir. »

 

Je la connais bien.  C’est elle qui avait soigné mon fils il y a environ 5 ans quand il était tombé avec ses rollers dans la rue.  Justement aujourd’hui, pendant la vente, j’en reparlais à l’infirmière.  Et maintenant, 10 minutes plus tard, non, 5 ans plus tard, j’ai à nouveau besoin d’elle.   On dirait quand même que là-haut il y a quelqu’un qui s’amuse avec nous.

 

Elle m’apporte les premiers soins et me conseille vivement d’aller aux urgences pour faire mettre des points. 

 

Il est 19h30, je me mets tout de suite en route vers Hazebrouck. 

Accueil standard, carte d’identité, carte vitale, carte assurance maladie périmée,…  Salle d’attente standard aussi.  Un monsieur tout seul, qui semble souffrir de sa jambe.  Une jeune maman avec son petit enfant, joues rouges gonflées, sur ses genoux.  Une famille de quatre dont une petite fille d’environ 6 ans, j’estime. La dernière avec un comportement standard, bouger tout le temps, toucher à tout, embêter sa  maman, renverser la tasse de choco chaud, l’autorité parentale est très loin…

Au mur une télé sur TF1, des pubs qui passent. 

 

Heureusement qu’il y a maintenant le portable, on ne risque plus de devoir se regarder, ni parler.

 

Une demi-heure passe, rien qui bouge.  Sauf la télé.  Encore des pubs qui passent (c’est quoi cette chaîne ???) et une annonce du prochain programme, « Masked Singer ».  Je ne connais pas ; qui regarde encore la télé ces jours ci ? 

 

Ah voilà la première personne appelée.  Cela avance bien, je ne suis là que depuis une heure.  Une heure remplie de pubs pour couches toujours sèches, voitures dans le désert, fromage industriel et assurances déguisées.  Des arbres qui semblent chanter ???  Heureusement qu’ils n’ont pas mis le son. 

 

Texto de ma collaboratrice.  Elle a fini, tout nettoyé, tout rangé.  C’est une crème, un diamant brut.  Très brut.  Mais très diamant.  Elle pense déjà à l’organisation des prochains jours.   Et si elle peut faire quelque chose ?  Oui, m’amener des oranges et faire avancer les soins ici. 

 

Il est 22h, je texte ma femme que tout va bien.  Elle ne m’a même pas encore vu puisqu’elle était en route pour chercher ma fille à la gym ; Crossfit, désolé, ce n’est pas du tout la même chose.

 

Sarah me texte et me conseille d’aller à SOS-mains à Lille la prochaine fois.  Cela m’aide beaucoup !  De un, là c’est trop tard pour changer.  Et de deux, ça laisse déjà entendre qu’il y aura une prochaine fois.

 

23h, on m’appelle, yés !!!  Une gentille infirmière m’amène à une salle de soins.  Me demande ce qui s’est passé.  Et où se trouve ma fromagerie sur Eecke.  Et quelles sortes de fromages je fabrique.  Et où on peut les acheter.  Et d’où vient mon accent… Mais moi je ne suis pas là pour faire de la promo, j’aimerais bien être soigné et rentrer !  Elle remplit un gobelet d’un liquide rouge et me demande d’y tremper mes doigts abimés.  Et elle part.   Sans doute le protocole.

 

Elle revient et me demande si je suis à jour avec mes vaccins.  Oui parce que j’étais dans la même salle il y a trois ans.  C’était aussi pour une coupure à mes doigts, sauf que ce jour-là j’avais essayé de tuer un moustique avec mon couteau.  Mais ça c’est une autre histoire.

 

Quelle situation !  Vendredi soir, presque minuit.  Je me trouve assis sur une table de soins aux urgences avec mes doigts dans un liquide qui me fait tout à coup penser à du Picon.  Même couleur, même consistance, avec un peu de mousse.  Vraiment ?  Ils utilisent maintenant du Picon pour désinfecter ?  Je goute… mmm…ou bien c’est autre chose, ou bien le Picon a fort changé de gout.  Cela fait 5 ans que je ne bois plus.  Depuis la création de ma petite entreprise.  Un bon conseil : Si vous en avez un peu marre, cherchez un métier qui vous passionne et arrêtez de boire.  Vous n’allez pas croire quelle énergie cela vous donnera !

 

Sur la vitre de la salle de soins des vieux posters de lapins, sans doute pour calmer les enfants.  Et une affiche qui explique comment le médecin soigne les plaies.  Vue les couleurs et le graphisme, j’estime l’affiche des années 80.  Je regarde autour de moi.  Presque tous les meubles dans la salle ont des roulettes.  Sans doute pour bien nettoyer le sol.  Je compte les roulettes, il y en a 49.  Bizarre les chose que l’on fait quand on attend.  Je remarque un tabouret à côté de l’armoire.  Je pense que je l’avais vu à la brocante d’Arnèke la semaine passée. 

 

Ma collaboratrice compare mes doigts dans le Picon avec du boudin.  Yéah, merci, ça m’encourage.  Minuit.  Elle me confirme qu’elle viendra demain matin 9h pour m’aider.  Un diamant, je vous l’avais dit.

 

Je texte ma femme d’aller dormir puisque je suis toujours dans le Picon.  Je sais très bien qu’elle ne le fera pas.  Je suis entouré de diamants.

 

Ah voilà, l’infirmière me prend mon Picon.  Je dois sécher.  Sans doute le protocole.

 

Un quart d’heure plus tard je crois vraiment que mon moment de gloire est arrivé.   Une petite dame entre la salle, regarde mes doigts et me demande si la peau coupée a été décollée ?  J’en sais rien, je n’ai pas vraiment étudié la blessure, j’ai juste essayé de stopper le sang.  La dame, légèrement nerveuse me dit que l’annulaire ça ira avec deux points, mais l’index avec un point ne tiendra probablement pas.  La peau est trop décollée.  Elle essayera quand même.

 

Est-ce que je veux qu’elle endorme mes doigts ?  J’en sais encore rien moi, on a le choix maintenant aux urgences ? 

 

Donc  soit deux piqures pour endormir les deux doigts, soit piqué trois fois sur la pointe des doigts pour mettre les points.  Elle me dit que piquer dans la pointe des doigts fera très mal, c’est très sensible.  Pourtant avec le couteau j’avais rien senti.  Mais cela fait aussi 5 ans que je suis fromager, j’ai de l’expérience.  Elle n’aime pas les blagues.  Robot.

 

Donc j’ai le choix entre 2 fois piqué ou 3 fois piqué, mais « piqué tu seras ! » elle me dit.  Le choix me semble évident.  2 piqures et une attente de 10 minutes plus tard et hop, les festivités peuvent recommencer.  Toujours pas d’humour, celle-là. 

 

Tout se passe bien, sauf la pointe sur l’index qui ne tient pas, elle m’avait averti pourtant !

 

Elle met un bandage mais oublie le tulle gras donc voilà tout à refaire.  « Moi aussi je suis fatigué », elle me lance.  Pourquoi elle dit « aussi » ?  Moi je n’ai jamais dit que j’étais fatigué !  Je me suis juste levé à 5h30 pour chercher mon lait à la ferme, ensuite j’ai fabriqué 100kg de P’tit Belge, j’ai enchainé avec mon administration, ensuite j’ai fait le point sur mes stocks dans la cave et j’ai fait la vente du vendredi soir.  Après, j’ai patienté 5h pour 3 points dont un mal mis et là je vais rentrer, raconter tout à ma femme et préparer mes affaires pour la vente de ce weekend à la fête des Moulins à Hazebrouck.  Il en faut plus pour fatiguer un fromager, hé !

 

Elle a sans doute eu aussi une longue journée, je me dis.  Et encore une longue nuit devant elle.  Peut-être qu’elle a déjà sauvé deux vies.  Ou pas.

 

Je quitte la salle.  Deux gendarmes surveillent une salle ou une infirmière essaie de calmer un homme qui a visiblement abusé de certaines substances.  Faut que je luis raconte ma théorie sur l’alcool, je me dis.

 

Je quitte les lieux.  Plus personne à la réception.  La salle d’attente encore bien occupée.  Bon courage à eux aussi. 

 

 

La porte est fermée, je prends la sortie de secours. 

 

C’est sans doute le protocole.


Janvier 2022

 

Une petite histoire tranchante...

 

Voilà que l’autre jour un de mes fermiers où je vais chercher mon lait me raconte une histoire. Eh oui, il arrive régulièrement que, pendant que le bon lait de la traite coule dans ma citerne, nous ayons deux minutes pour causer, à 6h du matin…

« Mon fermier » me racontait que dans le temps il était à l’école agricole. Ses parents avaient une petite ferme et une vingtaine de vaches. Ils travaillaient fort et dur pour faire tourner leur petite entreprise familiale.

Un jour, notre fermier accueillait sa classe en visite à sa ferme. Une visite pédagogique ça s’appelle, je pense.

Le jour après, ensemble en classe, avec l’enseignant, ils faisaient un debriefing de la visite. Qu’est-ce que nous avons vu, qu’avons-nous appris, etc…

Un élève, qui était fils d’une très grande ferme avec plus de 100 vaches, prenait la parole et disait que des petites structures, telles que celle de notre fermier, n’avaient vraiment pas de futur. Le futur était aux grandes exploitations.

Tous les autres élèves regardaient notre jeune apprenti fermier timide…il devenait tout rouge, était impressionné, ne pouvait plus rien dire,…

Cet incident l’avait marqué. Notre apprenti fermier grandissait et se mettait en tête qu’il voulait faire honneur à tout le travail et tout le temps que ses parents avaient investi dans leur ferme.

Ses parents ont depuis pris leur retraite bien méritée. Ils vivent encore bien heureux à la ferme familiale, laquelle est maintenant gérée par notre fermier et ses deux frères. Toujours une petite ferme, quelques dizaine de vaches et sans doute aussi quelques hectares en plus mais toujours à petite échelle. Et florissante !

Il est, je pense, aussi bien fier et content de livrer depuis quelques années son lait à La Fromagerie d’Eecke. Et nous sommes très fier de pouvoir travailler ce bon lait et d’en faire une dizaine de sortes différentes de fromages gouteux.

Et notre « grand » fermier dans l’histoire ? Aucune idée, mais nous espérons qu’il va très bien aussi.


Octobre 2020

 

Une livraison (pas trop) réussie…

 

Voici une petite histoire que je partage volontiers avec vous. J’ai quelques clients à Watou en Belgique. Je les livre régulièrement ; sauf que, avec cette histoire de confinement, cela était devenu moins évident…

Fin mars, une bonne semaine après le début du confinement, mes clients belges passent commande. « Ca va aller pour passer la frontière ? » « Oui, oui, raison professionnelle, donc ça passe », je leur dis.

Dans toute ma prévoyance, je prends les petites routes pour aller à Watou ; les grandes sont sans doute contrôlées, voire bloquées, je me dis. Hélas, c’était juste l’inverse.

Presque arrivé à Watou, par les petites routes, voilà un grand tas de terre qui bloque le chemin. Mince, et maintenant ? « Passe par Abele », me lance un gentil riverain.

OK,pfff…j’y étais presque. Je recule, mais aïe !, je ne vois pas la barrière qui se trouve à moitié dans le fossé, à moitié sur la route. Un « boum » plus tard, et je vois la barrière quand même. L’arrière flanc de la voiture flambant neuve abimé ; mince !!!

Reculer, tourner, passer par Abele, livrer, et rentrer…

Assurés, certes, mais une franchise qui dépasse largement la valeur de la livraison… pas vraiment une opération réussie.

« La cerise sur le gâteau » viendra deux semaines plus tard. Une belle petite lettre de la gendarmerie belge. Je roulais à 67 au lieu de 60 à Abele ce jour là ; € 57 d’amende. En plus !

Non, je le sais, un client c’est sacré et j’y retournerai certainement bientôt. Mais je ferai quand même un peu plus attention…